Lettre au PM : intervention en Irak


Vaut mieux prévenir que guérir. Après avoir eu vent que le président Bush pourrait demander à Paul Martin la collaboration du Canada dans l’effort de reconstruction en Iraq (Cyberpresse : Bush demanderait d’envoyer des troupes), je me suis empressé d’envoyer un message au premier ministre. …

    Monsieur le Premier Ministre,

    J’apprends ce matin que le président des États-Unis pourrait demander la participation du Canada dans la reconstruction de l’Irak (http://www.cyberpresse.ca/actualites/article/article_complet.php?path=/actualites/article/05/1,63,0,022005,910711.php). Je désire vous signaler ma vive opposition à une telle participation. Il appert qu’une telle requête ne viserait qu’à donner un lustre de crédibilité à la malheureuse intervention américaine en Irak. L’administration Bush ne manquerait de s’en gargariser sur toutes les tribunes, éclaboussant au passage la réputation du Canada sur la scène internationale.

    Je ne m’oppose surtout pas à la participation du Canada à la reconstruction de l’Irak. Je crois, au contraire, que le Canada à tout intérêt à aider le peuple irakien et le gouvernement nouvellement élu. Toutefois, il serait sage pour le Canada d’utiliser d’autres avenues, plus neutres, pour ce faire.

    Agréez mes salutations distinguées,

    François Guité

Vous pouvez également communiquer avec le bureau du Premier ministre à l’adresse suivante : pm@pm.gc.ca . N’hésitez pas utiliser le libellé de mon message si le sujet vous tient à coeur.

Il me semble, par ailleurs, qu’un réseau de blogueurs peut s’avérer un moyen efficace d’action politique et sociale. Il suffit de mettre à la disposition des lecteurs un texte, libre de droits, qu’il leur suffit ensuite d’acheminer aux personnes ciblées. Façon simple d’utiliser les TIC pour moderniser la démocratie et décentraliser le pouvoir.

SUITE…

Quelle agréable surprise : j’ai reçu hier une réponse personnalisée à mon courriel, que je reproduis ci-dessous.

    Monsieur,

    Au nom du très honorable Paul Martin, j’accuse réception de votre courriel récent.

    Nous avons pris connaissance de vos propos avec grand intérêt. Comme la question que vous soulevez relève de l’honorable Pierre Pettigrew, ministre des Affaires étrangères, j’ai pris la liberté de lui transmettre copie de votre courriel. Je puis vous assurer qu’il saura y accorder toute l’attention voulue.

    Je vous remercie d’avoir écrit au Premier ministre.

    L.A. Lavell

    Executive Correspondence Officer

    Agent de correspondance

    de la haute direction

Je n’attendais rien de cette lettre envoyée au bureau du premier ministre, mais il agréable de savoir que l’on peut écrire à nos dirigeants et que notre message sera lu.

Mieux encore, ce matin j’apprends que le premier ministre n’entend pas envoyer de troupes en Irak (Cyberpresse : Paul Martin n’enverra pas de soldats). Hum… je ne pensais pas avoir tant d’influence :-)


SUITE… (11 décembre 2005)

J’ai reçu, plus tôt cette semaine, cette réponse de M. Pierre Pettigrew, ministre des Affaires étrangères :

    Monsieur,

    Le premier ministre m’a transmis votre courriel du 7 février dernier au sujet de la situation en Iraq. Je regrette de n’avoir pu vous répondre plus tôt.

    Le Canada appuie fermement la transition politique en Iraq en conformité des dispositions de la résolution 1546 du Conseil de sécurité des Nations Unies du 8 juin 2005. Nous croyons qu’un processus crédible, démocratique et inclusif est essentiel à la stabilisation de l’Iraq. Le Canada a appuyé fermement le processus politique en Iraq par le biais d’une contribution de 20 millions de dollars en réponse à l’appel des Nations Unies pour le soutien des élections, et une contribution de 7 millions de dollars à la Mission internationale sur les élections en Iraq dirigée par Élections Canada.

    En effet, le Canada contribue depuis très longtemps au renforcement de la stabilité et de la bonne gouvernance dans les situations d’après-conflit et la bonne gouvernance est un objectif prioritaire de l’aide canadienne en Iraq. Un Iraq stable, prospère et autonome, qui respecte les droits de ses citoyens et de ses voisins, est dans le meilleur intérêt de la communauté internationale. Le gouvernement du Canada a engagé des crédits de 300 millions de dollars pour l’aide humanitaire et la reconstruction en Iraq afin de soutenir cette vision ambitieuse, mais réalisable.

    En vertu de la résolution 1546, les Iraquiens sont allés aux urnes le 30 janvier 2005 et ont élu une Assemblée nationale de transition composée de 275 membres. L’Assemblée a entrepris l’élaboration d’une nouvelle constitution. Le 22 août 2005, un projet de constitution a été présenté à l’Assemblée nationale iraquienne. Tout au long du processus de rédaction, des questions se sont avérées litigieuses, entre autres, le rôle de l’Islam dans l’État, les droits des femmes et le fédéralisme. Les Chiites arabes et les Kurdes ont appuyé le projet de constitution. Les changements apportés au projet de constitution au cours de la semaine précédant le référendum du 15 octobre 2005 ont mené certains groupes sunnites à appuyer le document. En outre, la participation au scrutin dans les régions à forte concentration sunnite a été plus élevée que lors des élections de janvier. La constitution a maintenant été ratifiée malgré un taux de rejet élevé dans les régions dominées par les Chiites arabes. Des élections démocratiques marquant la fin de la transition auront lieu d’ici le 15 décembre 2005.

    Des représentants de plus de 60 pays et organisations internationales, y compris les Nations Unies, la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, ont pris part à la réunion du Comité des donateurs du Fonds international pour la reconstruction en Irak (FIRI) qui s’est déroulée à la mer Morte, en Jordanie, les 18 et 19 juillet 2005. Le Canada, en tant que président du Comité des donateurs du FIRI, a réitéré son appui aux efforts constitutionnels de l’Iraq, ainsi qu’à l’engagement ferme de l’Iraq à soutenir l’égalité des sexes et une meilleure efficacité des institutions de défense des droits de la personne. L’acceptation d’une proposition canadienne pour un examen indépendant des programmes des Fonds fiduciaires représente une étape essentielle vers une plus grande reddition de comptes, ce qui devrait favoriser les contributions au FIRI. Le Canada est partisan de partenariats multilatéraux améliorés et est déterminé à mobiliser d’autres appuis en faveur de la reconstruction en Iraq.

    Il est important de noter que le gouvernement du Canada ne fournit aucune troupe de combat à l’Iraq. Cependant, nous collaborons activement à accroître les capacités iraquiennes en matière de sécurité car nous reconnaissons l’importance que ceci représente pour la stabilisation de l’Iraq. Le Canada a envoyé 20 instructeurs de police pour former des recrues iraquiennes au Centre international de formation de police de la Jordanie à Amman. Deux officiers de la Gendarmerie Royale du Canada agissent également à titre de conseillers de police de haut niveau auprès du ministère de l’Intérieur de l’Iraq à Bagdad. Nous croyons que l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) peut jouer un rôle utile en participant à l’entraînement des forces de sécurité iraquiennes et nous contribuons 1 million de dollars à l’OTAN pour permettre aux membres des forces de sécurité iraquiennes de participer à des activités de formation à l’extérieur du pays.

    Pour des renseignements à jour sur les efforts du Canada en Iraq, je vous encourage à visiter le site Web d’Affaires étrangères Canada à www.dfait-maeci.gc.ca/middle_east/iraq-fr.asp.

    Le Canada continuera de travailler avec les autorités iraquiennes à la reconstruction et à la réforme démocratique de l’Iraq, ainsi qu’à la mise en place d’une constitution respectueuse des normes internationales en matière de droits de la personne, y compris en ce qui a trait à l’égalité des sexes et aux droits des minorités.

    Je vous remercie de votre courriel et vous prie d’agréer, Monsieur, l’expression de mes sentiments les meilleurs.

    Pierre S. Pettigrew

Je remercie le ministre Pettigrew de cette réponse détaillée. Je le félicite surtout d’avoir pris le temps d’expliquer la position de son gouvernement. Il est réconfortant de savoir, aujourd’hui encore, qu’il est possible d’entretenir des communications avec ses représentants. On pèche trop souvent par désillusion dans nos rapports avec nos institutions politiques. Il est vrai qu’il est toujours plus facile de rabaisser que de communiquer de façon correcte.

Évidemment, il s’est passé beaucoup de choses depuis le début février. Les événements font en sorte que je ne peux qu’applaudir à la participation du Canada aux efforts de reconstruction en Irak. Le fait que le Canada soit intervenu conformément à une résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies écarte la crainte que j’avais que l’administration Bush se targue de l’appui du Canada. Les citoyens d’un pays occupé et ravagé par la guerre ont certes besoin de l’aide internationale. C’est d’ailleurs une facette de notre diplomatie qui a toujours fait en sorte que je suis fier de mon pays.

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