L'élection de Ratzinger
Pourquoi un païen devrait-il s’intéresser à l’élection de Joseph Ratzinger à la papauté ? D’une part pour dénoncer le battage médiatique qu’il a essuyé (et auquel il est contraint de participer). Mais surtout parce qu’il s’inquiète de l’accession d’un autre leader de l’extrême droite à un poste aussi influent sur la scène mondiale. …
Malgré (ou en raison de) son intransigeance religieuse, j’admirais Karol Wojtyla pour son globalisme, son ouverture aux autres religions, sa foi inébranlable, mais surtout sa compassion et son humanitarisme. Cet homme-là transsudait l’amour pour son prochain. Pas étonnant, puisqu’il était un philosophe.
Pour l’instant, Ratzinger, que les Européens ont baptisé le « berger allemand », n’inspire que la crainte. Comment ne pas se défier d’un homme pour qui la sécularisation constitue une menace contre l’humanitarisme (Le Devoir : Les déclarations passées du cardinal devenu pape) et qui considère les autres religions chrétiennes comme défaillantes (The Globe and Mail : Pope Benedict XVI vows to reach out). Saura-t-il voyager comme son prédécesseur pour se rapprocher des fidèles ? Son âge et son attitude permettent d’en douter.
À une époque où on commence véritablement à chercher des solutions pour aider les pays du Second et du Tiers-Monde, il est permis de s’inquiéter de l’accession au pouvoir d’un pape aux vues élitistes et conservatrices. Rappelons que le pape chapeaute une église qui compte le sixième de la population mondiale. Jean-Paul II ne craignait pas de dénoncer l’insensibilité de George W. Bush. Je ne crois pas que le nouveau pape en fera autant.
Jean-Paul II communiait avec le peuple, jusque dans ces obsèques. Benoît XVI semble vouloir communier avec l’aristocratie.
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Le soir de l’élection, à RDI, j’ai eu l’occasion d’écouter une émission où l’on retrouvait trois invités qui parlaient de la nomination de Ratzinger. Deux profs d’université en théologie (Mme Roy, UQAM et M. Snyder, Sherkbrooke). Mgr Couture était aussi de la partie. Les deux universitaires étaient fort craintifs de cette décision et ne se gênaient pas pour le dire et expliquer pourquoi. J’ai adoré la façon dont ils essayaient de provoquer un sain débat autour de la question du renouvellement de la mentalité de l’Église. Malheureusement pour les croyants modérés et plus souples, il semble qu’ils aient bien peu d’interlocuteurs pour alimenter la question…
Lorsque vous dites : «Jean-Paul II communiait avec le peuple», je comprends que vous n’entendez pas les femmes, les homosexuels ou les enfants sidéens, mais bien les hommes hétérosexuels suivant ses directives (et ayant suffisamment de revenus pour se déplacer le rencontrer). À partir du moment où un groupe crée des exclus, n’est-ce pas là une forme d’aristocratie?
J.-P. II fut (et demeure en raison de ses encycliques) un danger public comparable à W. Bush. À titre d’exemple, ne vous souvenez-vous pas de l’une de ses directives encycliques qui soutenait que le féminisme était la source de tous les maux (http://ledevoir.com/2004/08/12/61207.html)?
Ceci étant dit, je suis tout à fait d’accord que ce que l’on sait de Ratzinger n’est guère rassurant et qu’il faut bien craindre et ce, même à titre de païens l’impact qu’auront ses décisions sur l’ensemble de la communauté mondiale!
Encore une fois merci de partager ainsi vos idées et de nous permettre d’y réagir. Je trouve la chose de plus en plus intéressante!
Mon intention n’était pas de faire le panégyrique de Jean-Paul II, mais seulement de mettre en évidence des qualités qui semblent faire défaut chez son successeur. Je lui reproche tout autant ses positions par rapport aux femmes que son refus de l’homosexualité. C’est ce que j’entendais par « Malgré [...] son intransigeance religieuse ». Toutefois, je reconnais son intégrité intellectuelle et l’ardeur de ses convictions, lesquelles suscitent un débat au sein de l’Église catholique d’où la vérité, je l’espère, finira par émerger.
En toute objectivité, il faut reconnaître que Jean-Paul II a fait des pieds et des mains pour visiter les fidèles dans leur pays. Sans doute peut-on lui reprocher de ne pas avoir sali ses mules papales dans les ruelles boueuses des bidonvilles. Mais je ne veux pas juger d’une problématique qui m’est inconnue. À ce que je sache, il n’a jamais refusé de voir quelqu’un en raison de sa pauvreté. On peut l’accuser de dogmatisme, certes, mais à mes yeux il n’avait rien d’un aristocrate.
Bien désolé de vous avoir ainsi offusqué. Mea culpa.
Mais je n’étais point offusqué, Sacco. Au contraire, je te suis reconnaissant d’avoir pu clarifier mon propos.
C’est curieux, parce que j’ai tout fait pour éviter de paraître agacé (ce n’est pas la première fois qu’on me laisse entendre que j’ai l’air d’être offusqué). Il faut croire que j’ai encore à travailler mon style. Autoflagellations
Parfaitement d’accord, le Pape est une figure influente sur la scène internationale. Le fait que l’on en ait élu un d’extême droite n’est pas rassurant.
Pariculièrment lorsque l’on constate la montée incontestable du pouvoir d’influence de la droite religieuse aux États-Unis.
Je crains beaucoup les intégristes, ils ont un peu trop tendance à croire que la fin (ou la cause) justifie les moyens (généralement différentes formes plus ou moins aigue de violence.
Je crois que depuis quelques années le Pape a de moins en moins de pouvoir sur le monde et ses décisions mais par contre il interdit des choses importantes pour l’egalite et la santé ex: l’ordination des femmes et le port de condom. Si l’Afrique ( un peuple entièrement chrétien) est un des endroit ou on retrouve le plus de cas de SIDA dans le monde. C’est vrai ils sont moins eduqués te plus pauvres mais je pense que une des causes c’est qu’il écoute la religion… Benoit XV1 etant un Pape conservateur ne fera pas bouger les choses comme le peuple chrétien le veut.
D’extrême droite, dites-vous? J’ose penser que vous vous êtes tous les trois laissés emporter par… par quoi, justement? Sur l’échelle gauche-droite, où se situent les «païens» que vous dites être? Est-ce que les païens, considèrent le Christ — que le personnage soit réel ou fictif — comme un extrémiste de droite?
Sur mon échelle à moi, l’extrême droite est occupée par les dictateurs et les despotes.
Tu as raison, Louis-Vincent, de souligner le paradoxe de l’effritement de l’autorité de l’Église catholique (en Occident, du moins) et de la gravité de ses ordonnances. Je suis impressionné par l’étendue de ta réflexion, Louis-Vincent. Inconsciemment (ou sciemment), tu as intégré plusieurs aires d’interaction. Et ça semble naturel chez toi. Je vois que tu n’excelles pas seulement dans les sports.
Si je peux me permettre un commentaire constructif, cependant, essaie d’éviter l’emploi de superlatifs tels que « entièrement », « toujours », « tout », etc. Les choses sont rarement tout l’un ou tout l’autre. L’Afrique n’est pas « entièrement » chrétienne. En fait, elle est 40 % chrétienne (dont les catholiques constituent seulement une partie), 40 % musulmane, et 20 % indigène. Et n’oublie pas de passer tes textes au correcteur grammatical ; ça m’a pris du temps, moi aussi, pour découvrir cela
La foi (ou l’absence de foi) ne se mesure pas sur une échelle politique. C’est une incohérence. Toutefois, il est permis de situer les opinions sociales à incidence politique sur l’échelle de la gauche et de la droite. La mienne repose sur les positions prises par Ratzinger sur des sujets qui relèvent moins de la foi que de la gouverne des hommes. Je maintiens donc mon jugement. Quant à l’allusion divine, Ratzinger est peut-être un christ, mais il n’est pas le Christ.
M. Trudeau,
Ni le billet, ni les commentaires ne font référence au Christ. Ce dont il est question c’est des orientations doctrinales du nouveau Pape, de sa vision de l’Église.
En évoquant ici la gauche et la droite, je ne crois pas que personne ait fait référence à leur signification strictement politique. Il s’agit plutôt de l’usage courant qui est fait de ces expressions pour désigner des courants conservateurs et progressistes à l’intérieur d’un mouvement social ou d’un groupe social. C’est du moins dans ce sens que j’ai utilisé l’expression « extrême droite ».
Cependant, si vous préférez ultra-conservateur, soit. Le nouveau Pape est ultra-conservateur. N’allez pas croire qu’il s’agit d’une perception de « païen » car elle largement partagée à l’intérieur même de l’Église. Vous devez certainement le savoir. Dans le cas contraire, vous connaissez bien mal cette Église dont Benoît XVI dirige maintenant la destiné.
Quant à la dictature, elle n’a rien à voir avec la droite ou la gauche politique. Il y a eu des dicateurs de droite, (Hitler, Mussolini) et de gauche (Staline, Mao).
Cela dit, je ne sais pas à quel trois vous faites référence exactement, mais je vous signale qu’en ce qui me concerne, je n’ai pas dit être « païen », ni athée, ni avoir révélé quoi que ce soit d’autre à ce sujet. Je vous serais très reconnaissant de bien vouloir en tenir compte.
Hier soir, je n’avais voulu répondre à M. Trudeau, je me serais peut-être emporté. Messieurs Chartrand et Guité ont, ce matin, bien synthétisé mes idées. Je me permets toutefois de souligner que je n’ai pas soutenu que Ratzinger faisait partie de l’extrême droite, mais bien que si J.-P. II était un danger public, Ratzinger l’était, au moins, tout autant. Ça me suffit pour l’instant pour craindre l’impact de ses positions.
Loin de moi d’avoir voulu provoquer ce remous. Étant de ceux qui croient que les mots ne sont pas innocents, j’ai été renversé par ceux que François utilise dans son billet («leader de l’extrême droite», «n’inspire que la crainte», «semble vouloir communier avec l’aristocratie», pour ne citer que ceux-là) jurent avec son style habituellement plus serein, plus limpide et plus nuancé… Style qui se retrouve d’ailleurs, dieu merci, dans ses interventions subséquentes à travers les commentaires. Je reste cependant perplexe face à cette utilisation généralisée d’un vocabulaire politique trop souvent galvaudé dans les médias et dans l’opinion publique… Pour ma part, je préfère espérer : merci donc à tous de m’avoir rassuré un peu, et mes excuses d’avoir présumé à tort que vous étiez tous païens ;-).
Formidable, Jean. Merci d’aiguillonner ma réflexion quant à mon écriture. C’est la deuxième fois dans ce billet que cela se produit. Je continue d’apprendre. Cette fois, tu me fais réaliser qu’il faut éviter les superlatifs, et surtout quand le sujet est délicat. (C’est ironique, n’est-ce pas, puisque je faisais la leçon à Louis-Vincent, un peu plus haut, sur ce point ; cordonnier mal chaussé !). Je reconnais que j’ai eu tort d’utiliser l’expression « leader de l’extrême droite » ; « leader de la droite » serait plus juste (c’est une opinion, bien sûr). Quant aux deux autres passages que tu cites, je croyais que l’emploi de « inspire » et « semble » suffiraient à tempérer le propos. Ah, comme l’écriture est difficile !