Soufflé du travail d'une élève
Le prof de géographie m’a accosté plus tôt cette semaine pour me montrer le travail d’une élève dont il était ébahi. Avec raison. Le travail intitulé La Montérégie (cliquez sur l’image pour un agrandissement en taille réelle), réalisé par Ariane C. H., une élève de 1re secondaire, constitue un magnifique exemple de la puissance créatrice que les nouvelles technologies mettent aujourd’hui entre les mains des élèves. L’équilibre du texte, des formes et de l’image confère à ce travail une allure professionnelle qui séduit le regard. Pas étonnant que tous les enseignants présents étaient émerveillés. On est loin des documents Word auxquels on nous a habitués.
Ce travail est le résultat d’un court projet de géographie. Le prof, qui connaît peu de choses en informatique, mais qui ne craint pas d’inciter les élèves à expérimenter avec les nouvelles technologies, a demandé à ses élèves de créer un document hors de l’ordinaire. Manifestement, il est très pro-réforme. La jeune fille s’est alors tournée vers son père qui possède une expertise en infographie. En fait, le document a été réalisé avec Quark, un logiciel professionnel de mise en page.
Que le travail découle d’une application qui vaut près de 1000 $ (CDN) n’est pas aussi important que certains voudront bien objecter. Le même genre de document pourrait avoir été produit à l’aide des formidables modèles offerts dans Pages, un logiciel d’Apple dont le prix éducationnel n’est que de 59 $ (incluant Keynote). Un exemple (non retouché) en est donné ci-après. Ce n’est certes pas aussi souple ou puissant que Quark, mais cela a l’avantage d’être plus convivial pour des élèves.
Il n’y a de mal, selon moi, à apprendre aux élèves à utiliser des modèles tout faits. D’une part, l’école ne dispose pas d’assez de temps pour enseigner les arcanes de logiciels professionnels tels que Quark, Photoshop, ou Macromedia. D’autre part, il faut savoir compter sur le partage de l’expertise professionnelle, expertise à laquelle chacun ne peut pas viser. Et puis, des modèles… ça se modifie et ça se partage, comme dans iWorkCommunity.
Par ailleurs, ce travail illustre bien que la réforme ne connaît pas seulement des ratés, comme la presse le laisse entendre depuis quelque temps (à titre d’exemple : Les élèves stagnent ou régressent). Au contraire, le travail d’Ariane témoigne de la construction des connaissances que peut engendrer la collaboration parent-élève. C’est, il me semble, un aspect sous-estimé de la réforme. Alors que les parents sont souvent dépassés par le flot de connaissances déclaratives qui peut émaner de l’école (connaissances qu’ils ont dans l’ensemble oubliées), ils possèdent tous, par contre, des compétences à partager avec leurs enfants.
Enfin, sur une note plus triste, je déplore une fois de plus la désuétude des équipements informatiques avec lesquels nous devons travailler (ou ne plus travailler) dans les écoles. Comment ne pas rager contre une école qui a sabré (pour ne pas dire « salopé ») les blogues des élèves. Ne serait-il pas merveilleux que chaque élève puisse exposer de si belles réalisations sur le Web, accompagnées d’explications, dans un portfolio de vie ?
Par ricochet :
La création multimédia : une compétence ?
L’avenir est-il aux blogs multimédias ?
Exposer les productions multimédias
Le texte vs le multimédia
Vivement la créativité !
Les enfants pensent en images, les profs en mots
Le futur de l’intégration des TIC est arrivé
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blabla
Bonsoir François,
En effet, ce travail est magnifique. Il n’y a pas de doute là-dessus. C’est également vrai que les TICs permettent le déploiement de la créativité, quand on a les outils qu’il faut comme tu en fais très justement la remarque. Cependant, il y a un point qui me trouble beaucoup dans ton billet, c’est lorsque tu écris :
« Par ailleurs, ce travail illustre bien que la réforme ne connaît pas seulement des ratés, »
François, excuse ma naïveté, mais je ne comprends pas du tout en quoi ce travail (ou, peut-être plus justement, le type d’activité d’apprentissage proposé qui en a rendu la réalisation possible) est typique de la réforme. En quoi ce travail aurait-il été impossible, non, disons seulement difficilement imaginable il y a disons cinq ans? Et pourquoi pas il y a 10 ou 15 ans même, si on élimine la variable « disponibilité de la technologie » qui n’est pas vraiment en cause ici? La question peut te paraître anodine, voire un peu ridicule, mais je t’assure que, pour moi, elle est capitale.
Très constructif, le braillement de Bla-Bla. Un biberon avec ça ?
Heureusement qu’il y a des gens comme André pour approfondir la discussion.
Fameuse question, André. Tu m’as fait douter de mon affirmation pendant un bon moment. Je te réponds demain, car je tombe de sommeil.
Je poursuis ma réponse au commentaire d’André.
Effectivement, on ne peut pas toujours déterminer l’approche pédagogique au seul jugé du produit final. Dans le cas illustré dans mon billet, on pourrait arriver au même résultat en recourant à une approche magistrale, quoique cela nécessiterait beaucoup de temps de classe. Ce qui caractérise une approche, c’est principalement les fondements théoriques qui la sous-tendent, le processus pédagogique, ainsi que les rôles respectifs et interactifs dévolus à l’enseignant et à l’apprenant.
J’ai sauté aux conclusions en affirmant que le travail d’Ariane illustre bien l’efficacité de la réforme. C’est parce que je sais que l’enseignant est un réformiste. Mais comme ce n’était pas le propos de mon billet, j’ai escamoté le sujet.
Malgré que ce ne soit pas impossible, je ne suis pas certain que dans le contexte actuel un enseignant qui boude la réforme puisse arriver à un tel résultat. Quoi qu’il en soit, il est rassurant de constater que les réformistes réussissent tout autant que les tenants de l’enseignement explicite, sinon mieux.
Merci beaucoup, François, d’avoir pris la peine de me répondre avec autant de pertinence. Je trouve particulièrement intéressante l’idée selon laquelle une approche pédagogique se caractériserait par « les fondements théoriques qui la sous-tendent, le processus pédagogique, ainsi que les rôles respectifs et interactifs dévolus à l’enseignant et à l’apprenant.». C’est une idée qui me séduit et qui me paraît particulièrement féconde.
je trouve que c’est impressionnant que des élèves travaillent aussi bien et je trouve que c’est même du travail d’adulte. BRAVO