Le blogueur en tant que médiateur des commentaires
Les blogues ont un caractère éminemment privé. Mais leur diffusion dans Internet et la dynamique des commentaires leur confèrent également une dimension communautaire. L’interaction de ces deux volets constitue, en quelque sorte, l’apanage des blogues. Si le volet communautaire demeure relativement fixe, d’où son rôle de supervision et de contrôle, il n’en demeure pas moins que chaque blogue reflète l’idiosyncrasie de son auteur. À une époque où chacun se sent anonyme devant l’autorité politique et bureaucratique, il faut sauvegarder l’individualité des blogues pour faire contrepoids à l’aplanissement des forces collectives. Mais dans la mesure où chaque blogueur supervise sa parcelle de la blogosphère, quelle responsabilité a-t-il quand son espace est envahi par une polémique communautaire ?
Mon blogue a rarement servi d’arène à une querelle entre des membres de la communauté éducative. Cependant, la chose s’est produite récemment à la suite d’un billet publié il y a plus d’un mois. Steve Bissonnette, bien connu pour son opposition à la réforme, est intervenu pour relancer le sujet du billet sur la question de l’efficacité de la réforme. Aimant bien engager la discussion avec les lecteurs qui me font l’honneur d’un commentaire, et conscient de l’importance de la rhétorique, j’ai échangé quelques commentaires avec M. Bissonnette en me campant du côté des principes qui sous-tendent la réforme. De guerre lasse et préférant consacrer le peu de temps dont je dispose à d’autres sujets, j’ai fini par abandonner la partie.
Or, quelle ne fut pas ma surprise de voir la discussion reprendre de plus belle, deux semaines plus tard, entre Robert Lyons d’une part, et Steve Bissonnette et Normand Péladeau d’autre part. Cet échange a donné lieu à une rafale d’une quarantaine de commentaires, que j’ai évidemment suivie avec intérêt. Je suis intervenu sporadiquement pour encourager monsieur Lyons. Malencontreusement, un commentaire exaspéré de M. Lyons a pris un ton envenimé. Devais-je intervenir pour tempérer le ton du débat ? La question m’a tracassé, mais ma réflexion m’a amené à laisser le champ libre.
Dans l’esprit de l’individualisme, je réclame le droit de déterminer les règles s’appliquant à la gestion des commentaires sur mon blogue. Toutefois, il importe de définir ces règles. Par conséquent, voici quelques les quelques règles par lesquelles j’entends juger de l’acceptabilité des commentaires :
1. Promouvoir la liberté d’expression : Je crois fondamentalement à l’importance de la discussion et du choc des idées. Quoique mon seuil de tolérance soit élevé, j’ai des limites. Par conséquent, je n’accepterai pas…
- - les propos injurieux
- les propos diffamatoires dans une intention malveillante
- les propos blasphématoires (je reçois bien les idées, non les saletés)
- les propos haineux.
2. Défendre la vigueur dans les échanges : La vérité nécessite parfois l’expression crue des idées. Ce blogue s’adresse à des adultes consentants. Par conséquent, qui s’engage dans la dissension doit accepter d’être rabroué, dans la mesure où les propos sont conformes au point 1.
3. Préserver la pertinence des billets : J’interviendrai si je juge qu’un commentaire dévie outre mesure du sujet d’un billet.
4. Éliminer le spam : Je n’ai aucune tolérance pour les commentaires de nature bassement commerciale, surtout quand ils n’ont aucun rapport avec le sujet du billet.
À ceux qui m’accuseront d’autocratisme, je répondrai que ceci est d’abord un espace personnel, et non un forum ou une liste de discussion. Voilà… qu’on se le tienne pour dit
Par ricochet :
edu-ressources vs les blogues
Blogues et convictions
Pour ou contre les commentaires ?
Apologie de l’anonymat
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Je crois que la position que tu prends dans ce billet est pleine de bon sens, François. Je ne vois pas comment tu pourrais être taxé d’autocratisme. Je pense comme toi, un carnet web est un espace personnel. J’ajoute que, de ce fait même, son propriétaire en est le premier responsable devant la communauté. Il est donc normal qu’il soit celui qui en détermine les règles d’utilisation par la communauté à laquelle il est ouvert. Je me souviens que Mario Asselin a déjà laissé un commentaire, je ne sais plus sur quel carnet, dans lequel il s’adressait au propriétaire du carnet en question à peu près dans ces mots : « après tout, je suis chez toi ». Cette expression m’était tout de suite apparue tout à fait juste. D’ailleurs, je serais curieux de connaître la responsabilité légale du propriétaire d’un carnet s’il tolérait des propos diffamatoires dans les commentaires de son carnet.
Définitivement, ta position est pleine de bon sens. En plus, elle a maintenant l’avantage d’être explicite pour tous ceux et celles qui souhaitent laisser un commentaire sur ton carnet.
Les considérations légales ne m’étaient pas venues à l’esprit. Merci de les porter à mon attention, André (et de ton appui).
Dans ma réflexion, je me suis rappelé une lecture sur les fameuses écoles privées britanniques qui expliquait entre autres que les éducateurs de ces institutions se montraient assez indulgents à l’endroit des bagarres. Selon eux, ça forme le caractère.
Je ne suis pas vraiment d’accord avec ce type se règles, même si je ne nie pas que chaque bloggers puisse ériger les limites qu’il souhaite sur son blog, puisque justement je considère la toile comme un espace de liberté. Mais de là à faire du prosélytisme pour que d’autres acceptes des règles fondées sur l’arbitraire ….
Parce qu’il s’agit bien d’arbitraire :
- où commence l’injure et ou s’arrête-t-elle ?
- Qu’est-ce qu’un propos haineux ?
- Sur quels critères définir le blasphème ? Etc…
Le blogger est juge et partie alors que les valeurs morales différent d’un blog à l’autre…
Il faudrait arriver à penser qu’on n’est pas sur un blog comme dans un salon et que les règles qui prévalaient dans la vie réelle ne sont pas forcément reproductible sur la toile : le contexte est totalement différent !
Le point de vue de Mikkado est légitime. C’est une position qui se défend.
Pour ma part, je préfère défendre les valeurs humaines où que l’on soit, le Web ne faisant pas exception.
Je conviens que l’interprétation de ces valeurs a quelque chose de subjectif. Mais c’est le propre de la nature humaine. On ne peut pas toujours tout définir avec certitude. Il faut savoir accepter certains consensus sociaux. À défaut d’être objective, je crois que ma position a au moins l’avantage de clarifier un certain flou.
J’ai préféré exprimer mon opinion. Et je remercie Mikkado d’en avoir fait de même, d’autant plus qu’il exprime un désaccord. La divergence aiguillonne bien davantage la réflexion.