Les droits d'auteur en éducation à l'ère des TIC


Le monde virtuel est un far-west sans frontières où les règles se dessinent au vague de la nature humaine. Les institutions établies tentent tant bien que mal de légiférer un domaine qui dépasse leur portée. Les mécanismes d’adoption et d’implantation des lois sont à la fois trop lents et trop limités pour cet univers impalpable et mutant. Les droits d’auteur, par exemple, sont écharpés dans ce monde invisible où l’information (texte, images, audio, vidéo) circule librement et instantanément. Le concept même de propriété intellectuelle est attaqué.

Les écoles, qui doivent composer avec des budgets limités et une société en plein bouleversement, ne savent plus où donner de la tête. Les professeurs sont mal informés des lois, eux qui, de toute façon, ont d’autres chats à fouetter. Les élèves, pour leur part, ont l’illusion de la gratuité d’internet et puisent allègrement dans cette corne d’abondance.

Le Berkman Center for Internet & Society, rattaché à la faculté de droit d’Harvard, vient de publier un rapport sur les obstacles à l’utilisation éducationnelle du matériel protégé par les droits d’auteur à l’ère des nouvelles technologies de l’information (The Digital Learning Challenge: Obstacles to Educational Uses of Copyrighted Material in the Digiatal Age ; aussi en PDF). Le rapport identifie quatre principaux obstacles dans le contexte actuel :

    • Des lois inadéquates ou peu claires au regard des droits d’auteur, notamment en ce qui a trait à un usage acceptable ou scolaire.

    • L’utilisation grandissante des technologies pour contrôler les droits d’auteur ou verrouiller le contenu.

    • Les contraintes bureaucratiques à l’obtention des licences requises.

    • Une prudence excessive dont font preuve les éditeurs ou les administrateurs scolaires.

Le problème est particulièrement épineux en éducation où les maisons d’édition investissent des sommes considérables dans la production de matériel didactique. La faible étendue du marché québécois ne fait qu’aggraver la situation. Le MELS ne facilite pas les choses en exigeant d’apposer son imprimatur à tout matériel officiel utilisé par les écoles, particulièrement au regard de l’accessibilité en ligne. Les professeurs, semblent-ils, n’ont pas les compétences nécessaires pour prendre leurs propres décisions, quoiqu’on leur confie les enfants.

Les enseignants subissent le carcan du tout ou rien. Le matériel des éditeurs est offert en boîte plutôt qu’en vrac. Puisque les manuels sont chers et les écoles pauvres, un seul ouvrage est permis. L’enseignant a avantage à ne pas se tromper, dans la mesure où il a la chance de choisir le manuel en question. Plusieurs doivent composer avec un manuel choisi par d’autres, soit un prédécesseur, un collègue, un conseiller pédagogique ou un directeur. Dans le contexte de la réforme, les nouveaux manuels arrivent sur le tard, obligeant les enseignants à précipiter leur choix.

Les nouvelles technologies de l’information appellent de nouveaux modèles de matériel scolaire. D’abord, l’unicité du papier doit faire place à la diversité du multimédia. De plus, il faut offrir autre chose que des produits sous emballage. Les contenus à la pièce présentent une myriade de possibilités pour les professeurs qui ne manquent pas de créativité, en plus d’accroître la motivation des élèves.

Plutôt que se faire une lutte sans merci en vendant des produits finis onéreux qui sont difficiles à rééditer, les éditeurs gagneraient à offrir en ligne un contenu en vrac. D’abord parce que les contenus y sont plus facilement modifiables, et ensuite parce qu’il se créerait une mémétique du matériel scolaire par laquelle les éditeurs appendraient de l’usage collectif des enseignants. L’analyse des données de consommation aiderait les éditeurs à confectionner du matériel pertinent.

Pour le reste, évidemment, il y a Creative Commons.


Par ricochet :

Quand on incite les profs au piratage

Protection des droits des internautes

Creative Commons pour contrer le plagiat à l’école

CreativeCommons Canada

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