Mathématiques occidentales vs asiatiques
Les mathématiques ne sont pas une moindre immensité que la mer. (Victor Hugo)
Ah! ces Chinois… ils s’imposent comme la nouvelle aune de mesure. Tout le monde sent le souffle du dragon sur la nuque. D’où l’intérêt porté aux mathématiques, surtout après que les résultats de TIMSS 1999 aient situé les élèves des pays asiatiques en avance sur les nôtres (The Boston College Chronicle : Study Finds Asian Countries are Best in Math, Science). Un possible élément réponse réside dans la conception même des mathématiques. Une étude (PDF) révèle qu’en mathématiques les Chinois font davantage appel aux régions du cerveau affectées à l’imagerie motrice et à la planification, tandis que les occidentaux activent les fonctions langagières (Eide Neurolearning Blog : Math Success: More About Asian vs. Non-Asian Differences). Les chercheurs attribuent cet avantage à l’usage de l’abaque, entraînant ainsi une conceptualisation plus motrice et spatiale des mathématiques. Déduction non fondée, dira-t-on, mais avouons que c’est intéressant.
Cette différence n’explique pas tout, comme l’indiquent les autres références citées par Fernette et Brock Eide. Néanmoins, cela montre bien que nos approches pédagogiques ne constituent pas nécessairement le bout du monde. Nous avons certes beaucoup à apprendre des autres cultures, et dans une perspective planétaire, apprendre à apprendre s’avère un ambassadeur du pacifisme.
Toujours à propos de l’ethnomathématique, je suis émerveillé des concepts que dissimulent les mosaïques et les arabesques de l’architecture arabe (New York Times : In Medieval Architecture, Signs of Advanced Math). Pour revenir à la Chine, Tommy C. nous présente le magnifique Cube d’eau qui abritera les compétitions aquatiques aux Jeux de Beijing 2008. Je suis soufflé du savoir-faire chinois, lequel montre brillamment qu’il sait fabriquer autre chose que des jouets. Décidément, le dragon rouge s’élève maintenant au-dessus de nos têtes.
Mise à jour, 4 juin 2007 | Le Eide Neurolearning Blog (Math Teaching Under the Microscope — More East vs. West) approfondit encore le sujet des différences pédagogiques en mathématiques entre l’Occident et l’Asie, notamment quant à l’usage de la visualisation.
Mise à jour, 02 octobre 2010 | Une école du New Jersey a adapté avec succès le modèle d’enseignement des mathématiques pratiqué à Singapour, l’un des plus performants dans les comparaisons internationales (New York Times : Making Math Lessons as Easy as 1, Pause, 2, Pause …). Ce modèle a le mérite de miser sur la lenteur et la réflexion comme stratégies d’apprentissage.
(Image thématique : Abaque, par Paula Asprey)
Par ricochet :
Encore, et toujours, les maths
Origami, art et mathématiques
Les maths moins les mots
L’enseignement des maths : Chine vs U.S.
Mathématiques, art et architecture
Ethnomathématiques
Rethinking Mathematics (Jobineries)
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tsss, François, tu as écrit :
Une étude (PDF) révèle qu’en mathématiques les Chinois font font davantage appel…
Muzik :
« Ainsi font, font, font les petits Chinois agiles »
Merci de relever la coquille, Djeault. T’es plus efficace que ma relecture et mon correcteur grammatical rassemblés
Selon ce blog qui présenterait des extraits de la thèse doctorale de Dr Liping Ma, - Only 43% U.S. math teachers arrived at the correct answer to: 1 3/4 divided by 1/2 compared to 100% of the Chinese teachers. Problems included over-reliance on a mneumonic [sic] (without conceptual understanding), a lack of alternative ways to solve the problems, and limited analogical understanding. For the latter, for instance, U.S. teachers tended to rely on pizza-type examples for fractions, but became stumped with dividing by the 1/2.
Si ces données de Dr Ma sont véritables, parle-t-on de « guides aveugles » qui pourraient s’avérer être les véritables responsables de « l’infériorité mathématique » des Américains ? J’ai de la difficulté à concevoir que 43% des enseignants américains en maths, fussent-ils du niveau primaire, n’ont pas su répondre à ce problème de « 1¾ / ½ », auquel j’ai répondu en quelques secondes dans ma tête, puis vérifié avec ma calculatrice, au cas où…Serait-ce à cause du boulier compteur, alias abaque, qui a fait partie de mon enfance, ou encore parce qu’alors, les calculatrices de poche n’existaient pas encore ?
En effet, cet autre @rticle qui présente une étude du Professeur Jamie Campbell suggère que la différence vient du fait que si on utilise une calculatrice, on devient « poche » en maths, mais que si on n’en utilise pas une, on devient plus apte à solutionner des problèmes complexes : j’imagine que c’est un peu comme apprendre à conduire avec un jeu vidéo plutôt qu’apprendre à conduire au volant d’un véritable véhicule. Un autre énoncé du Professeur Campbell, c’est qu’on ne peut pas conclure qu’être Asiatique ou Chinois, ou la génétique égalent intelligence mathématique, mais plutôt que le succès en maths est assuré par la façon dont on l’apprend. J’ose ajouter que la qualité de l’intelligence mathématique des enseignants y est également pour beaucoup : on fait du bon jus de raisin avec des raisins murs, pas avec des feuilles de vignes !
Une autre piste de réflexion ethno-mathématique: jeu de go et jeu d’échec…
L’un est l’emblème des jeux de réflexion stratégique en Occident, l’autre fait de même… en Orient.
Dans l’un (aux échecs), la stratégie se déroule en une longue ligne de calcul de combinaisons successives (une phrase… de l’algèbre…), dans l’autre on envisage le déploiement parallèle d’un ensemble de figures géométriques (un plan… de la géométrie…).
Il est troublant que la science des échecs est une étude exhaustive des variantes de successions de coups. Alors que la science du go est celle de la reconnaissance de figures géométriques, dont la doctrine séculaire enseigne qu’elles sont efficaces, même si aucun maître ne se souvient que l’on jamais étudié de manière systèmatique et exhaustive toutes les combinaisons possibles !
La sagesse du go n’enseigne-t-elle pas que si la figure présentée par les pions sur l’échiquier est harmonieuse… alors c’est celle qu’il faut choisir ?
Lundi, 5 Mars 2007
19:00 – 22:00
Club de GO
Club de GO de l’Université Laval
Local 1170, pavillon Agathe-Lacerte
Entrée libre
Qui sait ? J’irai peut-être découvrir c’est quoi ce jeu dit de « GO » ?!
« le succès en maths est assuré par la façon dont on l’apprend. » J’avais récemment une discussion avec une collègue à ce sujet. Sa fille est très bonne en sciences, mais connaît de fortes difficultés en math. Ce semble être un problème entre sa façon d’appréhender le monde (plus holistique, comme celle des Chinois) et la façon d’enseigner les maths (plus particulariste).
P.S., à propos du « savoir-faire chinois » du Cube d’eau : le concepteur et maître d’oeuvre est européen (bien que l’idée est Chinoise)
Je n’avais pas fouillé le billet du Eide Neurolearning Blog aussi loin que Djeault l’a fait. Mal m’en a pris. C’est absolument effarant ces chiffres rapportés par Liping Ma voulant que 57% des professeurs de mathématiques américains aient échoué une question élémentaire, contre 0% pour leurs collègues chinois. Moi qui suis nul en maths, je connaissais aussi la réponse. On ne s’étonnera pas, après coup, que les Américains constatent d’inquiétantes baisses de résultats en mathématiques et sciences. Peut-être, effectivement, l’usage exagéré de la calculatrice y est-il pour quelque chose.
Les comparaisons entre les jeux d’échecs et de go sont très intéressantes, particulièrement pour les liens qu’il fait avec la pensée mathématique et la philosophie. C’est très instructif de la part de M. Tardif, que je remercie de son commentaire.
Merci aussi à Marc André de me corriger sur la conception du Cube d’eau. Ça m’apprendra à sauter aux conclusions. J’aurais dû être plus prudent, sachant que la Chine est assoiffée de technologie occidentale.
Woops : Correctum d’ERRATUM
Effectivement, plus haut, j’aurais du écrire que 57% ont poché et non 43%, sauf que ça rend l’affirmation du Dr Ma encore plus incroyable, d’autant plus qu’elle concerne des enseignants de maths !!