Les jeux vidéo appliqués à l'éducation
La maturité de l’homme, c’est d’avoir retrouvé le sérieux qu’on avait au jeu quand on était enfant.
(Friedrich Nietzsche)
L’attrait universel du jeu recèle un potentiel éducatif que l’école regimbe à exploiter. La tradition perpétue la croyance que l’apprentissage découle uniquement du labeur. C’est oublier que le cerveau est programmé pour apprendre. Puisqu’il s’agit d’un phénomène naturel, les seuls apprentissages vraiment laborieux sont ceux qui se font contre nature. L’école s’entête malheureusement à préférer les climats arides aux forêts luxuriantes. Les jeux vidéo, utilisés sciemment, peuvent pourtant colorier et fertiliser l’activité scolaire. Le rôle de l’école ne consiste pas seulement à faire apprendre, mais à faire aimer l’apprentissage. Le contraire mine l’esprit.
Malgré la mise en garde contre la violence dans les jeux vidéo et leur usage parfois maladif, les chercheurs continuent de se pencher sur leurs avantages éducatifs. Une étude au Chili, par exemple, constate des gains significatifs sur le plan de la motivation, de l’attention et du comportement (Cognitive Daily : Can video games stimulate academic learning?). Par ailleurs, les jeux vidéo développent des habiletés qui débordent des contenus disciplinaires, comme la pensée stratégique (BBC : Video games stimulate learning’). Une revue de la littérature sur le sujet (The use of computer and video games for learning; PDF) signale, entre autres, qu’ils engagent le joueur et qu’ils peuvent intégrer jusqu’à 36 principes d’apprentissage (Robin Good : Why Use Computer Games for Learning?).
Tous les jeux vidéo ne s’équivalent pas, la qualité étant une chose relative et fluctuant en fonction des variables. Ils doivent d’abord correspondre à un stade d’apprentissage. Dans une perspective scolaire, ils doivent également correspondre à des visées éducatives ciblées. Selon Rob Reynolds, un jeu vidéo éducatif doit comporter quatre caractéristiques importantes : être participatif, interactif, enclin à former une communauté, et divertissant (XplanaZine : Videogaming Success and the Four Principles of Good Education).
Éventuellement, les jeux vidéo vont se simplifier et se multiplier au point où ils pourront être appliqués à des objectifs éducatifs précis. Par ailleurs, leur légèreté fera en sorte qu’ils s’adapteront facilement aux cellulaires et aux iPods, la mobilité éducative débordant de la salle de classe.
Il n’y a pas de panacée en éducation. Les jeux vidéo, par conséquent, ne constituent qu’un outil parmi d’autres. Il est absurde, toutefois, d’exclure un moyen pédagogique actuel au moment où l’école perd de sa pertinence aux yeux des élèves. On aura beau dénoncer la superficialité du format, c’est oublier qu’il met en valeur un contenu, tout comme un manuel scolaire.
(Image thématique : Highland Games, par William Smith Ronald)
Par ricochet :
Lecture et jeux vidéo
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Bonjour,
Je suis heureux de retrouver un blogueur sérieux qui s’intéresse aux jeux… et à l’éducation. Mario to the go, Martin Bélanger et ce matin François Guitté, on dirait que tous les blogueurs se sont donné le mot pour parler des effets de l’informatique dans l’enseignement. Si cela peut intéresser quelques lecteurs, je poursuis moi-même une réflexion sur les effets néfastes des TICS et des jeux vidéo sur l’enseignement. Pourtant, je suis tout à fait d’accord avec le principe que l’apprentissage passe par le plaisir. D’ailleurs, je fais actuellement une recherche pour mon Collège sur des méthodes pédagogiques variées et efficaces qui passent principalement par l’aspect ludique de l’apprentissage. Mais il y a aussi des écueils à l’utilisation des TICS. J’en note seulement quelques-uns sur mon blogue.
En passant, bonne année 2008.
Je suis toujours frappé de voir quels efforts un bon coach est capable d’obtenir des jeunes qu’il entraîne à n’importe quel sport… Mais il est vrais que les jeunes restent libres de pratiquer tel sport, quand l’enseignement scolaire leur est presque toujours imposé.
J’ajoute le premier paragraphe de ton billet, en hightlight, à mes signets Delicious. Un classique…
C’est vrai que l’on néglige souvent l’importance de l’aspect ludique… Je crois que cet aspect s’associe souvent à la motivation au sens ou les jeunes sont toujours motivés à s’amuser. C’est dans leur nature!
Ainsi, j’aime bien le commentaire Christian. En tant que coach de basket, je suis souvent surpris de voir jusqu’où les jeunes sont capables d’aller pour quelques chose qu’ils aiment et trouvent amusant. J’aurais des histoires inroyables à vous reconter… Des histoires à faire rougir des joueurs de basket professionnels…
Revenons au thème des jeux vidéo.
Il y a maintenant environ un an, j’ai découvert les « serious games ». Selon Wikipedia (), un « serious game » est « …une application informatique qui combine une intention sérieuse, de type pédagogique, informative, communicationnelle, marketing, idéologique ou d’entraînement avec des ressorts ludiques issus du jeu vidéo ou de la simulation informatique. La vocation d’un Serious Game est donc de rendre attrayante la dimension sérieuse par une forme, une interaction, des règles et éventuellement des objectifs ludiques. »
J’ai découvert ce type de jeu vidéo très intéressant sur le blogue d’Emob (http://www.emob.fr/dotclear/). Ceux qui cherchent de l’information au sujet de l’utilisation pédagogique des jeux vidéo devraient fouiller ce concept… Très intéressant! Il y a même un salon ou colloque dédié à ce thème en Europe!
Bonjour,
Je suis journaliste et enquête sur la crédibilité des jeux éducatifs.
Auriez-vous des informations sur le sujet?
Avec mes remerciements,
Sophie
@Sophie : Une recherche dans Google Scholar, voire dans le Web, vous donnera certainement des résultats concluants. Pour ma part, j’ai souvent abordé la question des jeux vidéo. Voyez la section Par ricochet’ au bas de ce billet, ou utilisez le moteur de recherche intégré à mon blogue. Bonne chance!