Affranchir les écoles
L’économie était censée nous affranchir de la nécessité. Qui nous affranchira de l’économie? (Pascal Bruckner)
L’efficacité ou la vision de certains directeurs d’école que j’ai la joie de connaître nourrit encore l’espoir fragile que j’ai pour un système d’éducation. Car l’enseignement ne suffit plus dans un monde complexe et aux ressources diversifiées. La cohérence des apprentissages nécessite un consensus dont la réalisation exige un soutien direct à la fois aux élèves et aux professeurs. D’où l’importance d’habiliter le cercle immédiat des éducateurs qui gravitent au service des élèves. Par conséquent, j’applaudis les propositions (PDF) de la Fédération québécoise des directions d’établissement d’enseignement (FQDE) pour rapprocher le pouvoir décisionnel des élèves.
Mario a admirablement couvert la conférence de presse de la FQDE, publiant pas moins de quatre billets en rafale, dont trois en direct (Mario tout de go : Ramener le centre de décision à l’école; Les médias sont présents; Priorité à l’élève; Cinq propositions). Jean-Pierre Proulx, du RAEQ, n’a pas tardé également à exprimé son opinion (Blogue du RAEQ : Une école maîtresse d’elle-même et des directeurs maîtres dans leur royaume). Quant à la presse écrite, Malorie Beauchemin dresse un résumé de la situation (La Presse : Les directeurs veulent limiter le rôle de commissions scolaires), tandis que Clairandrée Cauchy souligne le besoin d’autonomie des directions d’école (Le Devoir : Les directeurs d’école veulent s’affranchir des commissions scolaires).
En passant, puisqu’on débat dans certains milieux de la valeur journalistique des blogues, je souligne quatre caractéristiques importantes des billets de Mario Asselin et de Jean-Pierre Proulx : l’immédiateté, l’expertise, la liberté d’expression et le volet éditorial.
Quant aux propositions de la FQDE (PDF), elles m’apparaissent dans l’ensemble assez justes comme point de départ à une discussion sur la gouvernance des écoles dans une société en métamorphose. À l’instar de Mario, j’affectionne particulièrement la quatrième proposition qui met l’accent sur les besoins particuliers de l’élève. Toutefois, deux lacunes importantes me sautent aux yeux : l’absence de principes au regard du type de gestion, notamment en ce qui a trait à une gestion participative de toutes les instances éducatives de l’école, et l’omission de la communauté sur le plan de l’arrimage local, de l’intégration et de la supervision.
Ne soyons pas naïfs. Les attaques contre les commissions scolaires, de même que la riposte (PDF) de la FCSQ qui en a fait sursauter plus d’un, ouvrent la voie à une lutte de pouvoir dans la structure scolaire. Jean-Pierre Proulx fait d’ailleurs un bon résumé des forces en présence. Quant aux études qu’il évoque relativement au peu d’effet que la décentralisation semble avoir sur l’efficacité scolaire, je serais curieux de savoir dans quelles conditions, avec quels moyens et quelles ressources s’est fait le transfert d’autorité.
Pour ce qui est des commissions scolaires, c’est peine perdue. Non seulement les réclamations de la FCSQ sont-elles d’une autre époque, mais elles ne trouvent pas écho dans les écoles. La FCSQ, par ailleurs, est imputable d’avoir échoué dans la transformation des écoles en fonction des changements qui secouent la société. Dans une démocratie, le pouvoir est affaire de responsabilité bien plus que de panache.
Mise à jour, 7 février 2008 | Il y a des jours où je néglige mon agrégateur. Mal m’en a pris ce matin en mettant ce billet en ligne. Sylvain donne aussi ses impressions sur la conférence de presse de la FQDE (Variations sur thèmes : Remaniement en éducation…). Son analyse est plus réaliste, et donc plus pessimiste, que la mienne.
(Image thématique : Independence # 452, par Fernando Vega)
Par ricochet :
La décentralisation des écoles (sans commission scolaire)
Projet pilote d’écoles autonomes
Les commissions scolaires sous le couperet
L’agonie des commissions scolaires
La caducité des commissions scolaires
Des écoles communautaires pour le Québec ?
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«…notamment en ce qui a trait à une gestion participative de toutes les instances éducatives de l’école, et l’omission de la communauté sur le plan de l’arrimage local, de l’intégration et de la supervision.»
Quel beau défi lancé ici au personnel des écoles et aux parents! Et ne nous faisons pas d’accroires, sans cette vision participative et communautaire, on risque tout simplement de transférer bêtement à d’autres niveaux décisionnels les tares du système actuel.
Jean, c’est exactement dans ce sens que j’ai écrit un (long) billet sur la question hier, sur mon blogue. Bref, mêmes enthousiasmes et mêmes bémols que vous messieurs.
Sur la ‘valeur journalistique des blogues’…
En plus des quatre valeurs ajoutées que tu soulignes avec justesse («l’immédiateté, l’expertise, la liberté d’expression et le volet éditorial»), il y a aussi ce que j’appellerais le dialogue avec le lecteur : dialogue explicite lorsqu’il y a interaction avec les commentaires; dialogue tacite lorsqu’il n’y en a pas. Il est vrai que certains journalistes laissent la porte ouverte aux commentaires à la suite de leurs articles publiés en ligne mais on se demande parfois s’ils prennent la peine de les lire…
… ou s’ils les publient tous…
Parfois, les contraintes sont tellement restreignantes, que certains commentateurs se taisent probablement – Exemple, nombre très limité de commentaire (1 seul parfois)* ou interdiction de lien URL chez src.ca qui pourrait amener un complément intéressant. Pour ce dernier exemple, on touche plus le manque d’interraction véritable des « blogues » officiels de certains journalistes.
*Je comprends toutefois que, parfois, le dialogue de sourd n’apporte plus rien, mais de là à limiter à 1 seul commentaire, je trouve cela exagéré.