L'intelligence collective au service de la science
La science est une chose trop importante pour être laissée entre les mains des seuls savants. (Carl Sagan)
Dans une autre variante de l’intelligence collective, InnoCentive récompense quiconque de ses membres peut résoudre un problème. Le service fait appel à un réseau de plus de 145 000 ingénieurs et scientifiques dans 175 pays pour surmonter les obstacles qui ralentissent les entreprises. Il ne s’agit qu’un exemple d’un vaste mouvement de la recherche libre (open research) qui bouleverse les pratiques usuelles de la science (New York Times : If You Have a Problem, Ask Everyone).
À l’aube du maillage virtuel, on assiste à une myriade de nouvelles applications de l’intelligence collective et, à mon avis, à un nouveau secteur de développement économique.
La capacité des réseaux virtuels à coconstruire le savoir constitue l’une des caractéristiques les plus négligées du connectivisme. Aussi l’ai-je ajoutée à mon schéma sur le sujet. J’y vois une sorte de socioconstructivisme alimenté par un réseau dont le contenu est dynamisé par des métadonnées, des moteurs sémantiques, la personnalisation des moyens et des statistiques (fréquentation, nombre de commentaires, etc.), pour ne nommer que ceux-là. Si le connectivisme puise dans l’intelligence collective, il importe, cependant, d’être conscient de ses pièges, comme la pensée de groupe.
À propos du connectivisme, ses critiques semblent oublier que la cause d’un phénomène constitue l’une des composantes de sa nature, comme l’affirmait Thalès. Ce ne suffit pas à réfuter les arguments, mais cela sert au moins la spécificité de la théorie.
(Image thématique : The Solution of the Riddle, par Joseph Kosuth)
Par ricochet :
Conférence / connectivisme : George Siemens
La Toile, l’intelligence collective et l’être
L’éducation dans un contexte mondial
Les jeux vidéo au service de l’intelligence artificielle
Constructivisme, socioconstructivisme et connectivisme
Une étude à l’appui du socioconstructivisme
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Comme dans toute chose, il y a du yin et du yang…et tout est affaire d’équilibrages ajustés en continue !
Un des pièges qui m’a le plus interpelé, c’est la polarisation de groupe
» Le terme de « polarisation de groupe » rend compte du fait que la plupart du temps, après discussion, les gens s’accordent sur des positions davantage extrêmes que la moyenne des positions avant la discussion.
Une première explication suggère que ce phénomène est dû à des questions de normes groupales : nous cherchons tous à être bien perçus au sein du groupe, ce qui nous conduit à prendre en compte l’avis des autres membres et à nous y conformer. Une fois la norme du groupe dégagé, chacun va chercher à l’incarner le mieux possible, d’où un glissement vers les extrêmes.
Une deuxième explication s’appuie davantage sur les problèmes d’influence informationnelle. Lorsque les gens sont réunis en groupe pour discuter, il y a de grandes chances pour que des arguments inconnus pour certains soient évoqués. Il appartient alors à chacun d’incorporer ces arguments à sa propre base de connaissance. Dans la mesure où tous ces arguments vont aller vers le même pôle au sein du groupe, il est normal qu’un glissement s’opère.
Il serait trop hâtif d’en venir à la conclusion que les décisions de groupe sont moins bonnes que celles prises individuellement. Il n’en reste pas moins qu’il nous appartient de nous méfier de ces dérives, tant sont nombreuses les occasions pour elles d’apparaître ; pensez notamment à la justice, à la politique, à l’éducation… »
Source : http://psychobranche.free.fr/matiere/polarisation.html
Peux-tu détailler ton tout dernier paragraphe : je n’en saisi pas tout le sens ! merci par avance
Je ne sais pas s’il faut parler d’intelligence collective dans le cas cité (Innocentive etc.). Peu importe à vrai dire le vocabulaire, mais il s’agit bien d’intelligence individuelle!
L’appel « au public » pour résoudre un problème est un des sujets traités en long et en large par « Wikinomics », vieux classique.
L’intelligence n’est individuelle que dans la mesure où l’on pense. Par conséquent, il y a une partie de nous qui provient de la pensée sociale, c’est-à-dire culturelle, quoique chacun interprète la culture à sa façon. Par ailleurs, l’intelligence individuelle n’est pas une chose arrêtée, mais fluide, fluctuant au gré des événements et des dispositions biologiques. Tenter de définir l’intelligence individuelle ou collective, par conséquent, est une entreprise très imparfaite. Philippe a raison, raison pour laquelle je penche aussi pour la recherche d’équilibre avancée par Florence.
Cela dit, la notion d’intelligence collective semble aujourd’hui utilisée à plusieurs sauces. Je ne m’en soucie pas trop, car je crois qu’elle n’a pas fini de s’étendre au rythme des nouvelles technologies de la communication.
D’autres exemples d’intelligence collective en science: le projet génome humain; le décodage ultra-rapide du SRAS; tous les projets de partage d’ordinateurs inspirés de Seti@Home. Et plus récemment avec les wikis: WikiSpecies (http://species.wikimedia.org/wiki/Main_Page) et Proteins Wiki (http://proteins.wikia.com/wiki/Main_Page). Tous deux tiennent à la fois du dictionnaire collaboratif et du carnet de note de chercheurs… mais un carnet de notes où chacun pourrait ajouter ses annotations, au profit de tout le groupe !