L’autonomie est une condition de l’efficactié. (Jack Lang)
En plus d’accroître l’efficacité, l’autonomie contribue à la motivation, souvent même à la construction de sens. En éducation, toutefois, l’efficacité est organisée en fonction du système, non de l’élève. L’appareil est devenu une fin en soi, car l’ordre et les emplois en dépendent.
Tout le monde est dans le coup. Les politiciens en vantent l’importance, car leur réélection en dépend. Les fonctionnaires en consolident les fondements; leur avancement en dépend. Les administrateurs dans les commissions scolaires en étendent les structures; leur raison d’être en dépend. Les conseillers pédagogiques en diffusent les normes; leur pertinence en dépend. Les directeurs d’école huilent les rouages; leur tranquillité en dépend. Enfin, les professeurs assurent le mouvement, car leur santé en dépend.
Un système ne saurait fonctionner sans modalités, mais encore faut-il qu’elles tendent à sa finalité. En éducation, il me semble, cette finalité est l’enfant (à moins que l’on soutienne que c’est la société, ce à quoi je m’opposerais). Qui alors protège les élèves de la lourdeur de l’appareil? Certes pas les parents pour qui la perspective d’un emploi futur en assure la pérennité. Si seulement ils réalisaient l’inefficacité de l’école sur le plan individuel. Plus d’autonomie et de responsabilité obligeraient à plus de réflexion, et ainsi à plus développement. De suiveurs, les élèves deviendraient faiseurs. Mais cela suppose plus de libre choix.
La Loi de Pareto, appliquée à la gestion, stipule que « 20 % des moyens permettent d’atteindre 80 % des objectifs ». Richard Koch va plus loin en affirmant que la loi des 80/20 s’applique à de multiples facettes de la vie, un postulat qu’il a d’abord énoncé dans The 80/20 Principle. Selon Koch, 80 % des résultats découlent de 20 % des causes, comme quoi nous portons le cinquième de nos vêtements la plupart du temps.
C’est Michel Desbiens qui m’a le premier signalé le palmarès des 10 utilisations du temps les moins efficaces, selon Koch. Ce qui a immédiatement frappé Michel, c’est que les neuf premières activités concernent le travail des élèves dans un contexte scolaire traditionnel. Ma curiosité ayant été piquée, j’ai insisté pour qu’il m’envoie la liste. Ravi de tant de perspicacité, j’ai suggéré qu’il la diffuse sur son blogue. Mais comme il a d’autres chats à fouetter, je la reproduis ci-après :
1. Activités que les autres vous imposent.
2. Activités qui ont toujours été exécutées de la même manière.
3. Activités dans lesquelles vous n’excellez pas.
4. Activités dont vous ne tirez pas de plaisir.
5. Activités qui sont constamment interrompues.
6. Activités qui n’intéressent à peu près personne.
7. Activités qui vous ont déjà pris deux fois plus de temps que prévu.
8. Activités dans lesquelles vos collaborateurs sont médiocres.
9. Activités dont le cycle est prévisible.
10. Répondre au téléphone.
Évidemment, ces boulets alourdissent aussi le travail des éducateurs et des gestionnaires. J’en suis victime. Une boutade d’un collègue me revient : « On n’a plus le temps d’enseigner. » Je compte bien à l’automne voir comment le principe des 80/20 peut améliorer mon travail. Quant aux élèves, c’est déjà commencé; mais si je suis impuissant face aux contraintes de l’administration, je peux certainement encore repousser les limites de la gestion de classe.
(Image thématique : Time, par Rusty Wolfe)
Par ricochet :
Les organisations apprenantes
Les savoirs vs les structures de l’école
Les vertus du désordre
Études sur l’efficacité de l’apprentissage dans l’action
Défier le statu quo
Le chaos appliqué à l’éducation