La méfiance serait cause de l'échec des réformes

RubensteinBohrDoubt.jpgLa méfiance est la sagesse des faibles. (Andrei Stoiciu)

Pour paraphraser le proverbe, on peut mener les enseignants à la réforme, mais on ne peut les forcer à y croire. Ultimement, ils déterminent l’émotivité de l’enseignement. Qu’on leur impose un cahier, ils le colorient à leur guise. Au regard de la réforme, c’est une évidence. La majorité des enseignants n’ont modifié que le contenu de leurs cours pour se conformer au nouveau programme de formation, sans rien changer de la méthode.

C’est parfaitement normal, puisque nous agissons en fonction de nos convictions. Le manque de confiance s’avère l’un des principaux facteurs qui minent les réformes, selon Charles M. Payne, professeur à l’Université de Chicago et auteur de So Much Reform, So Little Change: The Persistence of Failure in Urban Schools (EurekAlert! : Trying to satisfy too many agendas slows school reform).

Payne a analysé les tentatives de changement dans les systèmes scolaires des grandes villes. Du résumé qui en est fait, je retiens les éléments suivants :

    • Un manque de confiance entre les enseignants, la direction et les parents est souvent cause de dysfonction dans l’école.

    • L’infrastructure organisationnelle mine souvent les réformes les mieux intentionnées.

    • Le soutien à un enseignement de très haute qualité fait souvent défaut.


(Image thématique : Bohr’s Doubt, par Meridel Rubenstein)


Par ricochet :
Les affres de la réforme
Étude : les écoles échouent dans l’application des réformes
La réforme : mission impossible
La réforme a plus de 90 ans

Les affres de la réforme

Malgré ma défense passionnée de l’esprit de la réforme, les récents bilans négatifs, le départ inattendu de Robert Bisaillon du MEQ, les positions syndicales et les observations dans mon école secondaire augurent le pire. L’analyse que je fais de la situation ébranle mon optimisme pour la première fois. J’en suis arrivé à la conclusion qu’un tel changement systémique est voué à l’échec s’il repose sur le bénévolat des professionnels, aussi louable soit-il. Force m’est de constater que la pénurie de ressources, les négligences dans la formation professionnelle, l’absence de collaboration et un environnement physique mal adapté, voire rébarbatif, nécessitent une générosité d’efforts et de sacrifices extrascolaires qu’il est aberrant d’espérer de la part d’une collectivité professionnelle. Passé minuit, et je suis encore à m’échiner sur mon enseignement, seul dans le noir. Je crains que bien peu d’enseignants aient ce missionnariat, surtout quand on a oublié d’asseoir leur foi.