La créativité et l'apprentissage continu

Une autre indication que les esprits ne se développent pas tous pareillement : certains génies se manifestent précocement, tandis que d’autres atteignent leur apex après un long parcours. Certaines virtuosités ont l’éclat d’un feu d’artifice, alors que d’autres s’érigent lentement en bûchers. Fasciné par la créativité des grands esprits, David Galenson a découvert deux types de génie : les conceptualistes, dont l’oeuvre semble le fruit d’une intelligence hâtive, à l’instar de Mozart, et les expérimentalistes, dont le génie éclot plus tard, comme Cézanne (Wired : What Kind of Genius Are You?). Le tableau ci-dessous illustre la divergence des deux formes de génie.



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Cette théorie renforce l’idée que l’éducation doit faire une plus grande place à l’individualisation des apprentissages, entre autres pour cultiver les intelligences précoces. Toutefois, le danger avec la différenciation des voies éducatives demeure les parents qui obligent leurs enfants à des régimes accélérés de dopage intellectuel.

Par dessus tout, cette théorie valorise l’apprentissage continu. Le génie précoce est un phénomène plutôt rare. Les expérimentalistes, par contre, me semblent plus nombreux, en plus de suivre une voie sans doute plus souhaitable. L’épanouissement continu représente certainement un élément de motivation pour les élèves qui doutent de leurs capacités, surtout à une époque où ils sont sans cesse mesurés à leurs pairs.


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5 réponses

  • Bonjour,

    Les aspects de différentiation, de même que la valeur du temps (et de la recherche continue) sont intéressants. Mais il y a aussi un autre aspect qui me semble tout aussi intéressant.

    Les travaux de Galenson sur l’expression artistique (mais aussi le prolongement qu’il donne à ses recherches dans d’autres domaines) me semble contribuer, avec d’autres travaux sur les arts, à remettre en lumière l’interaction de la notion de travail (et peut-être aussi la patience?) avec le concept de créativité. Souvent, dans les idées reçues, le créatif est en quelque sorte celui qui a des éclairs de génie et se laisse entraîner par ce jaillissement. Il y avait un peu de ça dans la théorie du Romantisme allemand : le « Witz », l’éclair, étant une saisie intuitive du tout. On retrouve, bien sûr, quelque chose s’y rattachant dans différentes thématiques contemporaines, comme l’éloge de la folie ou encore l’éloge de l’excentricité. Dans cette mesure, le travail patient, minutieux, conserve sa valeur, mais celui qui s’y adonne sera tout de même perçu comme un type différent de l’individu créatif.

    Les recherches de Galenson semblent indiquer que ces considérations peuvent effectivement trouver une place dans le premier pôle de créativité qu’il identifie. Cependant, dans le second pôle du continuum de la créativité, ses observations montrent qu’il y a là un lien (intrinsèque?) entre le travail et la créativité. L’exemple de Cézanne qu’il prend alors me semble vraiment parlant, et à plusieurs égards.

    Cette interrogation donne de l’air frais à la réflexion sur l’idée de créativité, ou d’expression créative.

    Merci d’avoir signalé cet article, sa lecture est fort intéressante !

    Patrice Létourneau

  • Clément Laberge dit :

    Sur des thèmes semblables, j’avais trouvé particulièrement intéressante la lecture de ce livre il y a quelques années:

    Howard Gardner
    Les Personnalités exceptionnelles
    Mozart, Freud, Gandhi et les autres

    Voir:
    http://www.odilejacob.fr/catalogue/index.php?op=par_auteur&auteur=326&cat=0204&count=0&option=&desc=1250#1250

    La lecture est légère, habilement écrite (et traduite) et se prête à de nombreuses réutilisation dans des contextes éducatifs (avec des enfants, des élèves, des ados).

    Une très belle lecture estivale.

  • Très intéressant, cette notion de Witz. Merci de me la faire découvrir, Patrice. Je crois également que la créativité contribue essentiellement à l’identité, à l’ego et, par extension, à la weltanschauung ou à la conception du monde selon sa sensibilité. Si la créativité est indissociable de la synthèse, elle ne peut qu’agir sur notre conception des choses.

    Clément, tu me fais penser à une page Web qui s’intéresse justement aux grands personnages pour stimuler la créativité :Think Like a Genius and Its Qualities. Bon, ça n’a certainement pas la profondeur du livre de Gardner, mais ça peut mettre l’eau à la bouche.

  • meri dit :

    bonjour,

    cette théorie me semble vraiment fort intéressante. Mais je voudrais savoir est-ce qu’elle est valable également dans l’apprentissage continu pour les salariés?

    merci.

  • Il n’y a aucune raison de croire que l’apprentissage continu au travail soit épargné de ce développement tardif. Le cerveau ne discrimine pas entre les milieux d’apprentissage, pourvu qu’ils soient riches en stimuli. L’apprentissage informel, d’ailleurs, est particulièrement riche.



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