Les parents et les devoirs


Plusieurs professeurs comptent sur la participation des parents pour aider les enfants à faire les devoirs. Je suis d’ailleurs de ceux qui réclament une plus grande collaboration entre l’école et les parents. Mais cette avenue est semée d’embûches. En réponse au billet dans lequel je dénonce le recours systématique aux devoirs, Christian Jacomino faisait pertinemment remarquer que les parents n’ont pas l’expertise pédagogique pour faciliter l’acquisition des savoirs, alors que Luc Papineau, avec tout autant de finesse, relevait l’incohérence de l’aide des parents dans un contexte de réforme qui les déboussole d’emblée. Dans une perspective d’optimisation des apprentissages, la question de l’aide parentale aux devoirs, qui s’inscrit dans l’optique plus large du soutien scolaire, mérite une attention particulière (dans la mesure où les devoirs sont justifiés).

D’abord, quelques réserves relativement au commentaire de Christian. S’il est juste d’affirmer que les enseignants possèdent une expertise que les parents n’ont pas, il reste que la pédagogie n’est pas une science exacte ; parmi la panoplie de stratégies éducatives qui s’offrent à lui, le professeur ne trouvera pas toujours celles qui conviennent à l’enfant. Parfois, deux têtes valent mieux qu’une, d’autant plus que le parent connaît mieux son enfant et est en mesure d’apporter une aide individuelle soutenue.

Dans un autre commentaire, Mario, fort de son expérience de directeur d’école, soulève judicieusement que le rôle du parent doit en être un d’encadrement plutôt que d’enseignement. Dans les faits, cependant, cela n’est pas toujours le cas. Par ailleurs, il faut reconnaître que les élèves qui ont le plus besoin de devoirs sont ceux qui, justement, nécessitent de l’aide.

Idéalement, le professeur assignera des devoirs adaptés à la capacité. Mais il s’arrache déjà les cheveux à essayer d’individualiser les apprentissages ; lui demander de considérer également l’individualité des parents relève de l’utopie. Il s’agit plutôt de mettre à sa disposition quelques ressources utiles. Cela ne se fera pas du jour au lendemain. Mais petit à petit, on réussira à outiller les parents dans l’aide aux devoirs. Évidemment, cela se fera plus rapidement si le gouvernement reconnaît ce travail dans la tâche du professeur.

La question est surtout cruciale au primaire, car c’est souvent à la base que tout se joue. On aura avantage à y investir plus de ressources de façon à ce que les élèves partent du bon pied.

Comme les parents qui ont le plus besoin d’aide n’ont pas toujours accès à internet ou sont peu familiers avec les ordinateurs, les documents imprimés s’avèrent une solution utile. Malheureusement, la gestion du papier (impression, distribution, classement, coût, etc.) est un aria.

Le téléphone est une technologie davantage à la portée de tous. À ce sujet, Allô prof offre un formidable service d’aide aux devoirs, tant téléphonique qu’internet. Mais encore faut-il que les parents en soient informés. Les écoles gagneraient à montrer aux parents comment utiliser cette ressource.

Pour les parents branchés, les blogues scolaires constituent un formidable moyen de communication entre le professeur et les parents, lequel pallie la plupart des désavantages du papier. Par exemple, je crois que ce genre de billet, qui résume la façon de faire un compte rendu de lecture en anglais, peut aider un parent à superviser le travail de son enfant. Évidemment, le billet serait rédigé en français s’il était destiné aux parents.

La solution des pairs aidants, soulevée par Luc Papineau dans un autre commentaire, est excellente. Elle fait appel à l’entraide, au travail d’équipe et à la transmission des connaissances entre pairs. Pour ceux qui ont la chance d’utiliser les nouvelles technologies de la communication, l’élaboration d’un réseau social peut être d’un grand secours pour l’entraide aux devoirs. Ainsi, les blogues scolaires et les agrégateurs constituent non seulement de puissants outils d’apprentissage, mais également des ressources pour l’aide aux devoirs. À partir du moment où les élèves mettent leur travail en ligne, il devient un objet de discussion, voire de référence pour ceux qui éprouvent des difficultés. Le plagiat n’est pas réellement un problème dans ce cas, sauf si le devoir est superflu ; quand c’est utile, les élèves sont motivés à vouloir comprendre. Du coup, il serait trop bête de priver la majorité des élèves d’un moyen efficace à cause de quelques fainéants qui, quoi qu’on fasse, refusent d’apprendre.

Mise à jour, 24 avril 2007 | Une initiative anglaise qui tire profit des nouvelles technologies de la communication montre effectivement que les devoirs peuvent contribuer aux apprentissages quand enseignants, parents et élèves peuvent coordonner leurs efforts (EurekAlert! : Homework — Keeping chilidren, parents and teachers together).

Mise à jour, 9 septembre 2007 | Un dossier Canoe sur le sujet des devoirs (source : Le professeur masqué) :


Par ricochet :

Facteurs de réussite scolaire

Bloguer pour l’éducation des parents

Communiquer pour améliorer les rapports avec les parents

L’école pour les parents

Arguments contre les devoirs

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9 réponses

  • Étienne Roy dit :

    Bonjour,

    Les devoirs sont toujours un point sensible! Peu importe où on se trouve.
    À l’école de mes enfants, l’équipe-école a décidé de ne pas donner de devoirs cette année.
    J’en suis assez content, ce qui ne fait pas l’unanimité chez les parent!

    J’en discute ici.

  • Je suis franchement impressionné de voir qu’une équipe-école fasse consensus pour ne pas donner de devoirs. Chapeau ! Ça prend bien des Beaucerons !

    J’espère seulement que vous ne vous laisserez pas intimider par quelques parents qui élèvent la voix, persuadés qu’il faut presser les enfants comme des citrons et que les devoirs sont essentiels à l’apprentissage. Au cas où cela vous aurait échappé, vous trouverez sur le billet original plusieurs arguments pour étayer votre position.

  • Luc Papineau dit :

    Messieurs, bien le bonsoir!

    Premièrement, je pense parfois que les gens ne font pas la distinction entre devoir de type «exercisation» et devoir de «type travail de recherche», par exemple. Certains devoirs demandent aussi de la réflexion poussée et invitent au défi.

    Je pense entre autres à des activités d’apprentissage (quel doux euphémisme!) reliées à de la lecture ou encore à la création de phrases reliées à des procédés littéraires. Chaque année, quand je donne en devoir (oups!) à mes élèves de m’écrire des figures de style sur un thème donné, c’est un succès flamboyant. Ils le font à l’ordinateur, y incorporent des illustrations et j’en passe! Quand on parle de devoir, il conviendrait d’abord de préciser la chose avant de la condamner.

    Deuxièmement, il arrive parfois qu’un enseignant donne en devoir des exercices qu’il aurait aimé faire en classe avec les élèves, mais pour lesquels il manque de temps, soit parce que le programme est trop chargé soit parce que le groupe peut présenter des retards académiques importants. Il s’agit alors d’un outil non négligeable dont il aurait tort de se priver.

    En soi, c’est la motivation, la pertinence, l’encadrement et la qualité des consignes quant au travail à effectuer à la maison qui me semblent importants. Le reste, ce sont des chicanes de chapelles éducatives.

  • Je me suis mal fait comprendre. Je pensais moins aux parents qu’à certains animateurs associatifs chargés par les services sociaux de faire du soutien scolaire, et qui interviennent principalement après la classe.
    Ces initiatives partent toujours d’une bonne intention: aider les élèves les plus en difficulté. Mais elles contribuent à déresponsabiliser les parents en même qu’à cautionner l’idée qu’il y aurait un salut par les devoirs.
    Vous devez bien connaître cela au Québec?… Dites-moi.

  • Marc St-Pierre dit :

    Au-delàde nos (d)ébats pédagogiques, il faudrait se demander si les devoirs ne remplissent pas simplement des fonctions latentes essentielles du système qui ont peu ou pas à voir avec l’apprentissage. On pourrait mettre dans cette liste de fonctions: gestion de l’hétérogénéité au sein des classes ; positionnement stratégique et symbolique par rapport à des établissements environnants ou des classes voisines ; régulation de l’ordre et de la discipline sein de la classe ; maintien de l’autonomie professionnelle des enseignants, etc.

    Il s’agit quelquefois de changer de lunettes pour mieux saisir des aspects, qui à première vue, nous apparaissent moins évidents, compte-tenu de la grille de lecture qui est la nôtre.

    Je donne un exemple: dans un commentaire précédent, M. Papineau, parlant d’aide aux devoirs, observe que ce dispositif est difficile à mettre en place dans les grosses écoles secondaires, étant donné tout ce qu’on sait de ces milieux et de leur complexité apparente. Évidemment, avec l’image collective et quasi-folklorique de la grosse poly qu’on a intégrée, ses arguments semblent solides. Mais avec d’autres lunettes, on peut faire contrepoids aux aspects les plus négatifs de ces grosses écoles de deux-trois mille élèves.Si ces grosses écoles où rien ne semble possible n’étaient en fait que de petits villages, tout devient faisable, il me semble. Je viens d’une petite ville qui comptait autant d’habitants que la Polyvalente où j’ai travaillé. Et notre ville, on la trouvait trop petite. Aucune vie privée n’y semblait possible, toutle monde connaissait trop tout le monde.Tout le contraire de ce qu’on reproche aux « grosses poly ».

    Changer de lunettes, ça tue les excuses, quelquefois, et ça place en mode solution.

    PS: sur les fonctions latentes, il y ce billet sur l’attachement quasi contre-nature des enseignants au redoublement, malgré les évidences qui concluent unanimement à son inefficacité.
    http://carnets.opossum.ca/LeNeuf/archives/2006/09/de_redoublement_et_de_chaperon.html

  • À la lecture de tous ces commentaires, il me vient à l’esprit que l’on ne devrait pas parler de devoirs, mais de vouloirs. Si une tâche n’est pas assez intéressante pour amener l’élève à la faire, ou si l’enseignant n’a pas réussi à les convaincre les élèves de sa valeur, c’est qu’elle ne rapportera probablement pas grand-chose à l’élève. En cela, je rejoins Luc sur le plan de la motivation scolaire.

    Pour répondre à la question de Christian, il n’existe pas au Québec (du moins pas à ma connaissance) « d’animateurs associatifs chargés par les services sociaux de faire du soutien scolaire », et encore moins relativement aux devoirs. Il y a bien quelques parents pour payer des leçons privées données par des enseignants, mais ça ne va guère plus loin. Cela explique le malentendu de ma part.

    Enfin, j’aime bien l’intervention de Marc, qui nous ramène à une analyse plus holistique de la question. Les sujets de cette nature ne sont effectivement jamais aussi simples qu’on est porté à le croire. Les préjugés et les généralisations sont de terribles embûches à l’analyse.

  • Luc Papineau dit :

    M. Guité,

    Pour ma part, les devoirs ont été remplacés dans mes classes par des «activités d’apprentissage» parfois volontaires ou formatives, comme on dit. Mais je dois avouer que je suis bien jaloux de votre néologisme «vouloirs». Il faudrait que notre langue française fasse preuve d’un peu d’esprit d’invention parfois.

  • Merci du bon mot, Luc. Pour dissiper tout malentendu, si malentendu il y a, croyez bien que je ne porte pas de jugement sur votre pratique. D’abord, j’ignore tout du contexte dans lequel vous travaillez. Ensuite, il faut savoir faire la part des choses entre les généralités, l’idéal et la théorie d’une part, et la pratique, d’autre part. La théorie appelle à la rigueur, la pratique à l’indulgence.

    J’ai moi-même bien des croûtes à manger par rapport à ce que je crois devoir faire en classe. Mais j’aime à penser… ça oriente la pratique. Tout comme vous, il appert :-)

  • plotome dit :

    bien bonjour je voulais dire que on n’aime pas faire les devoir c’est plate!!!!!!!!!!! OOUUUUUFFFF………..



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